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28 septembre 2007 5 28 /09 /septembre /2007 11:06

Maître Marippan Muthaiah est avocat dans le Tamil Nadu depuis 45 ans. Dans le cadre de ses fonctions, qu’il entend dans un sens très gandhien de défense des plus pauvres,  il été confronté à des milliers de dossiers de paysans sans terre. Il nous explique quels sont les problèmes légaux qu’ils rencontrent.

« La loi sur la propriété de la terre est très compliquée en Inde et parfois même déconcertante. Après l’indépendance, un effort important a été fourni pour essayer de rationaliser la répartition de la terre en abolissant les intermédiaires entre l’Etat et les paysans [=le système des zamindars]. C’était une étape majeure, et même une petite révolution qui visait à rétablir le droit à la terre de ceux qui la travaillent. Dans le cadre de ce processus, toute une série de lois ont été adoptées par le parlement indien et les parlements régionaux. D’après la constitution actuelle, la propriété de la  terre est une prérogative des Etats et le gouvernement et le parlement centraux ont donc peu d’influence sur cette question.

 Globalement, le problème est le même dans tous les Etats indiens : la concentration de grands terrains dans les mains d’une poignée de propriétaires alors qu’une large proportion de la population travaille comme simple main d’œuvre agricole pour une partie infime des récoltes et a peur de se voir retirer la terre à tout instant. La première réforme décidée par le gouvernement a constitué à placer un plafond sur la superficie de terre que l’on peut posséder en faisant voter le « Land Ceiling Act ». Au Tamil Nadu [sud-ouest du pays] où je travaille, cette loi a été adoptée en 1957 et a placé le plafond à 30 acres de terrain, avant de le limiter à 15 acres [1 hectare=2,25 acres]. Cette loi a été soumise à la Cour Suprême, qui en a maintenu la validité. Pourtant, elle reste valide seulement sur le papier, car le gouvernement ne peut pas aller plus loin et la mettre en pratique : les grands propriétaires fonciers sont en effet présent massivement dans presque tous les partis politiques, à la fois à l’échelle nationale et régionale. 
Bien qu’un grand nombre de lois aient été votées pour  protéger d’expropriation les paysans, ils doivent souvent se battre très âprement pour jouir effectivement de la propriété de la terre après en avoir acheté leur part au propriétaire. J’ai défendu un grand nombre de paysans qui cherchaient à faire valoir ce droit. Même si le processus légal prend un temps fou, j’ai fini par gagner après un des rebondissements à rallonge. Bien évidemment, ces paysans qui se battent déjà pour se nourrir ne peuvent pas se payer les services d’un avocat, mais il existe un bon nombre d’avocats qui suivent les pas de Gandhiji  en leur offrant leurs services. Bien sûr des organisations comme Ekta Parishad [qui organise la marche d’octobre 2007] offre un soutien logistique et remboursent les frais de déplacements d’avocats comme moi.”

 Photo : couple de zamindars (DR)

 

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  • : Le blog de pondibéa
  • : reportage sur la marche des paysans sans terre indiens, de Gwalior à New Delhi, en octobre 2007
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Ce blog se propose de suivre d'un bout à l'autre la grande marche gandhienne "Janadesh 2007" des paysans sans terre indiens, oubliés de la croissance de l'"Inde qui brille". Il en expliquera autant que possible les tenants et les aboutissants et profitera de cet immense mouvement populaire -25 000 personnes, hommes, femmes, enfants, vieillards, en marche vers New Delhi- pour éclairer certains aspects de l'Inde contemporaine. Une Inde dont la population reste rurale à plus de 70%.
La blogeuse : Béatrice Roman-Amat, jeune journaliste passionnée par l'Inde.
Ce blog était à l'origine un blog de la rédaction du Monde interactif, mais quand lemonde.fr l'a archivé, je l'ai recréé sommairement sur over-blog.