Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
5 septembre 2007 3 05 /09 /septembre /2007 16:54

Mira et le Mahatma, de Sudhir Kakar (Le Seuil, 2006)

Voilà un livre à ouvrir sans réticence avant de participer  une grande marche non-violente se réclamant de la tradition gandhienne. Pourtant, le Gandhi de ce livre, mi-roman mi-biographie, n’est pas celui de la Marche du sel ou des discours publics, mais le « Bapu » (« père ») qu’on connu les membres de son cercle le plus proche, vu à travers les yeux  de Mira, jeune femme anglaise qui abandonna tout pour vivre à ses côtés. 

C’est un Gandhi dont la priorité a longtemps été de développer une communauté humaine parfaite, dans son ashram de Sabarmati, au Gujarat. « Elever un groupe disparate d’individus ordinaires, normaux, aux plus hauts niveaux de la vérité et de la non-violence » était selon lui essentiel, avant de faire se lever un peuple pour l’indépendance. Dans cet ashram qu’il irradie de sa force morale, il s’impose une semaine de jeûne ou des jours de silence quand  quiconque  commet le moindre péché.

Dans ces années 1920 où il considère l’Inde comme trop immature pour accéder à l’indépendance, il fixe trois objectifs à atteindre avant toute revendication : développer le khadi, éradiquer  l’intouchabilité, réaliser l’unité entre hindous et musulmans. Il surprend, et même choque profondément, les étudiants venus en masse l’écouter en prêchant que chacun doit commencer par nettoyer lui-même ses latrines, et non pas laisser un intouchable le faire, s’il veut vivre un jour dans un pays libre. Là où ils cherchaient l’affirmation d’une fierté nationales, il trouvèrent la plus abouties des humilités.

Mais Gandhi est aussi un homme qu’il est difficile d’aimer car il refuse toute dévotion pour sa personne, allant jusqu’à écarter de lui ceux qui tombent dans l’idolâtrie vis-à-vis de son « enveloppe charnelle ».

Le livre de Sudhir Kakar, psychanalyste indien, se fonde sur les lettres envoyées par Gandhi et les incidents de la vie de l’ashram, puisés dans des témoignages de contemporains. Il invente en revanche les lettres de Mira à son ami Romain Rolland, un des premiers français à avoir découvert la figure Gandhi.

Même quand on se croit bien informé sur la figure de Gandhi, ce livre révèle à quel point est exigeant et radical l'héritage du Mahatma. La grande marche Janadesh d'octobre 2007 sera-t-elle à la hauteur de cette référence dont elle se réclame ? Les organisateurs en connaissent e tout cas les méthodes : un sit-in dure depuis 160 jours dans l'Etat du Bihar (le plus pauvre d'Inde), tandis que dans l'Orissa une grève de la faim vise à obtenir des terrains pour les sans-abri.


Photo : Statue de Gandhi sur le front de mer de Pondichéry



Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Le blog de pondibéa
  • : reportage sur la marche des paysans sans terre indiens, de Gwalior à New Delhi, en octobre 2007
  • Contact

Texte Libre

Ce blog se propose de suivre d'un bout à l'autre la grande marche gandhienne "Janadesh 2007" des paysans sans terre indiens, oubliés de la croissance de l'"Inde qui brille". Il en expliquera autant que possible les tenants et les aboutissants et profitera de cet immense mouvement populaire -25 000 personnes, hommes, femmes, enfants, vieillards, en marche vers New Delhi- pour éclairer certains aspects de l'Inde contemporaine. Une Inde dont la population reste rurale à plus de 70%.
La blogeuse : Béatrice Roman-Amat, jeune journaliste passionnée par l'Inde.
Ce blog était à l'origine un blog de la rédaction du Monde interactif, mais quand lemonde.fr l'a archivé, je l'ai recréé sommairement sur over-blog.