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14 octobre 2007 7 14 /10 /octobre /2007 16:39

Bhopal. Ce nom suffit à donner des frissons dans le dos à quiconque a lu Dominique Lapierre (Il était minuit cinq à Bhopal). J’ai décidé de faire un petit crochet (enfin, “petit”, la proximité géographique est toujours relative en Inde : 10 heures de train de nuit dans chaque sens) par la capitale du Madhya Pradesh pour avoir une idée des conséquences que la catastrophe de 1984 continue à avoir sur la vie des habitants.
Rappel historique macabre : une nuit de décembre 1984, 40 tonnes de gaz mortel s’échappent de l’usine de pesticides américaine Union Carbide. Au moins 20 000 personnes périssent dans la catastrophe et sont enterrées sommairement dans des fosses communes. Un demi-million de personnes, sur une ville qui en compte 1,5 millions aujourd’hui,  souffrent de symptômes irréversibles qu’ils transmettent à leurs enfants. Dans un périmètre de deux kilomètres autour de l’usine désormais abandonnée, l’eau reste toujours hautement contaminée.

Rachna Dhinga travaille pour “International Campaign for Justice in Bhopal”. Elle énumère les pathologies dont souffrent les personnes ayant été exposées au gaz ou continuant à boire l’eau contaminée : cancers en tout genre, diabète, problèmes endocriniens, ménopause précoce…Les bébés, souvent prématurés et très petits, souffrent parfois d’une hypertrophie du haut du corps et d’autres handicaps physiques et mentaux.

La clinique où travaille Rachna (Sambhavna Trust Clinic) a été créée en 1996 grâce à des dons étrangers pour soigner gratuitement, en grande partie par les plantes, les malades chroniques de Bhopal, dont beaucoup avaient le système immunitaire affaibli par des années d’antibiotiques impuissants à les soulager. Sur les murs, des dessins d’enfants représentent des usines crachant une âcre fumée noire.

Ni le gouvernement indien ni Union Carbide (rachetée en 2001) n’ont entrepris quoi que ce soit pour décontaminer l’eau de Bhopal. Dans un an, le gouvernement devrait en revanche terminer l’installation d’une conduite d’eau qui amènera de l’eau de la rivière Narmada aux zones sinistrées, sans pour autant empêcher que chaque nouvelle mousson fasse pénétrer plus profondément les métaux lourds dans les nappes phréatiques.

En 2006, 57 personnes ont marché de Bhopal à Delhi (et oui, on marche beaucoup vers Delhi en Inde et pas seulement pour réclamer des terres) pour demander à Manmohan Singh de faire pression sur les Etats-Unis, qui refusent d’extrader Anderson, ancien PDG d’Union Carbide Corporation. Depuis, la position des Etats-Unis n’a pas bougé d’un iotat. Vendredi dernier (12 octobre) encore, une partie de la communauté indienne de Washington DC manifestait devant l’ambassade de l’Inde, indignée par l’incapacité des autorités à faire juger ceux qui ont rendu Bhopal si tristement célèbre.

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  • : Le blog de pondibéa
  • : reportage sur la marche des paysans sans terre indiens, de Gwalior à New Delhi, en octobre 2007
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Ce blog se propose de suivre d'un bout à l'autre la grande marche gandhienne "Janadesh 2007" des paysans sans terre indiens, oubliés de la croissance de l'"Inde qui brille". Il en expliquera autant que possible les tenants et les aboutissants et profitera de cet immense mouvement populaire -25 000 personnes, hommes, femmes, enfants, vieillards, en marche vers New Delhi- pour éclairer certains aspects de l'Inde contemporaine. Une Inde dont la population reste rurale à plus de 70%.
La blogeuse : Béatrice Roman-Amat, jeune journaliste passionnée par l'Inde.
Ce blog était à l'origine un blog de la rédaction du Monde interactif, mais quand lemonde.fr l'a archivé, je l'ai recréé sommairement sur over-blog.