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1 octobre 2007 1 01 /10 /octobre /2007 11:27

Les premiers marcheurs sont arrivés à Gwalior aujourd’hui : hommes, femmes, enfants, scandant “terre, eau, forêt, nous avons des droits” et “longue vie à Janadesh !”

C’est en gare d’Agra, ville connue des touristes occidentaux pour le Taj Mahal, que sont montés dans le train pour Gwalior les premiers groupes de sans terre. Sous les yeux ébahis des couples d’Indiens de la classe moyenne-supérieure, en jeans et T-shirts pour certains, jouant parfois avec leurs téléphones portables,  qui descendaient de New Delhi vers le Sud, quelques femmes ont motivé le groupe pour crier des slogans, alors que tous étaient un peu intimidés au début.


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1 octobre 2007 1 01 /10 /octobre /2007 11:18

Rajagopal, le “nouveau Gandhi” et organisateur de la marche, a dit qu’"entre le silence et la violence, il y a la non-violence active". Et justement, ce qui me frappe très vite quand j’arrive en Inde, c’est l’atmosphère sonore.  On conduit ici au moins autant avec son klaxon qu’avec son volant. A l’intérieur de n’importe quelle pièce, le frôlement des pâles de ventilateur est omniprésent. Dans la rue, les petits commercants s’interpellent en permanence. (photo ci-dessous : une rue d'Old Delhi vue depuis le minaret de la grande mosquée Jama Masjid)
Et pourtant,
Rajagopal a raison : le silence de la masse des travailleurs du bas de l’échelle est pourtant frappant.
De manière un peu impressionniste, dans la catégorie “reprendre pied en Inde”, voila aussi une remarque d’un commercant de New Delhi, vendeur de vêtements, qui m’a frappée : alors que je regardais la file énorme qui serpentait devant le cinema situé en face de sa boutique, il m’a dit “third class cinema, third class movies, third class people : mostly rickshaw drivers”. Remarque d’une violence inouie, non ? Ou au moins signe d’un mépris profond…
Mais cette première journée a surtout été marquée par la prise de contact avec la
Gandhi
Peace Foundation, point de chute a New Delhi de toutes les organisations qui perpétuent la philosophie gandhienne dans leurs actions sociales.
Demain, je prends le train pour Gwalior, où aura lieu le départ de la marche. Cette ville n’a pas été choisie au hasard : en 1972, un groupe de 500 hors-la-loi (ceux qu'on appelle en Inde les "dacoïts") y a déposé les armes devant un portrait de Gandhi, renonçant ainsi à l’usage de la violence. Et mardi 2 octobre, jour de l'anniversaire de Gandhi, la grande foule des sans terre se mettra en branle vers New Delhi.

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30 septembre 2007 7 30 /09 /septembre /2007 11:10

Panneau d'accueil à la Gandhi Peace Fondation, à Delhi.


Rue d'Old Delhi. Au premier plan, un conducteur de rickshaw-vélo.
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28 septembre 2007 5 28 /09 /septembre /2007 18:54

Dernier message posté de France, avant le départ pour l’Inde samedi : direction New Delhi, puis ralliement de Gwalior en train, où la marche débutera mardi 2 octobre.

A la fin du mois, les marcheurs seront à leur tour à New Delhi et organiseront un sit’in géant devant le parlement fédéral. [=le Lok Sabha, ou chambre du peuple, élue au suffrage universel tous les cinq ans.

L’Inde a un système bicaméral : la deuxième chambre, le Rajya Sabha, représente les assemblées législatives de tous les Etats].

Mais le pouvoir exécutif ne pourra pas non plus faire la sourde oreille à cette mobilisation massive. J’ai fait un tour sur le site Internet du gouvernement indien pour chercher à savoir quels ministres fédéraux pouvaient en priorité se sentir concernés par les revendications des paysans sans terre et….la liste est longue ! Dans le gouvernement actuel, de Manmohan Singh, il existe :


un ministre de l’agriculture,

un ministre des petites industries et des industries agroalimentaires et rurales,

un ministre des affaires tribales,

un ministre du développement rural,

un ministre de l’environnement et des forêts,

un secrétaire d’Etat au charbon et aux mines,

deux secrétaires d’Etat au développement rural,

un secrétaire d’Etat aux ressources en eau, etc…

Autant d’interlocuteurs potentiels pour Rajagopal et les autres leaders de Janadesh. A condition que chacun ne se renvoie pas la “patate chaude” de la question des sans-terre et de la pauvreté rurale…

Photo : le bâtiment du Lok Sabha, à Delhi.  
 

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28 septembre 2007 5 28 /09 /septembre /2007 11:06

Maître Marippan Muthaiah est avocat dans le Tamil Nadu depuis 45 ans. Dans le cadre de ses fonctions, qu’il entend dans un sens très gandhien de défense des plus pauvres,  il été confronté à des milliers de dossiers de paysans sans terre. Il nous explique quels sont les problèmes légaux qu’ils rencontrent.

« La loi sur la propriété de la terre est très compliquée en Inde et parfois même déconcertante. Après l’indépendance, un effort important a été fourni pour essayer de rationaliser la répartition de la terre en abolissant les intermédiaires entre l’Etat et les paysans [=le système des zamindars]. C’était une étape majeure, et même une petite révolution qui visait à rétablir le droit à la terre de ceux qui la travaillent. Dans le cadre de ce processus, toute une série de lois ont été adoptées par le parlement indien et les parlements régionaux. D’après la constitution actuelle, la propriété de la  terre est une prérogative des Etats et le gouvernement et le parlement centraux ont donc peu d’influence sur cette question.

 Globalement, le problème est le même dans tous les Etats indiens : la concentration de grands terrains dans les mains d’une poignée de propriétaires alors qu’une large proportion de la population travaille comme simple main d’œuvre agricole pour une partie infime des récoltes et a peur de se voir retirer la terre à tout instant. La première réforme décidée par le gouvernement a constitué à placer un plafond sur la superficie de terre que l’on peut posséder en faisant voter le « Land Ceiling Act ». Au Tamil Nadu [sud-ouest du pays] où je travaille, cette loi a été adoptée en 1957 et a placé le plafond à 30 acres de terrain, avant de le limiter à 15 acres [1 hectare=2,25 acres]. Cette loi a été soumise à la Cour Suprême, qui en a maintenu la validité. Pourtant, elle reste valide seulement sur le papier, car le gouvernement ne peut pas aller plus loin et la mettre en pratique : les grands propriétaires fonciers sont en effet présent massivement dans presque tous les partis politiques, à la fois à l’échelle nationale et régionale. 
Bien qu’un grand nombre de lois aient été votées pour  protéger d’expropriation les paysans, ils doivent souvent se battre très âprement pour jouir effectivement de la propriété de la terre après en avoir acheté leur part au propriétaire. J’ai défendu un grand nombre de paysans qui cherchaient à faire valoir ce droit. Même si le processus légal prend un temps fou, j’ai fini par gagner après un des rebondissements à rallonge. Bien évidemment, ces paysans qui se battent déjà pour se nourrir ne peuvent pas se payer les services d’un avocat, mais il existe un bon nombre d’avocats qui suivent les pas de Gandhiji  en leur offrant leurs services. Bien sûr des organisations comme Ekta Parishad [qui organise la marche d’octobre 2007] offre un soutien logistique et remboursent les frais de déplacements d’avocats comme moi.”

 Photo : couple de zamindars (DR)

 

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22 septembre 2007 6 22 /09 /septembre /2007 10:48

Les marcheurs partiront le 2 octobre de Gwalior, dans le Madhya Pradesh. Ils emprunteront l'autoroute vers le nord, qui les mènera, après un mois de marche, à la capitale fédérale, Delhi. A mi-chemin de leur périple se trouve Agra, ville mondialement célèbre pour le Taj Mahal, mais qui est également un centre industriel majeur du nord de l'Inde et une grande ville très polluée.
Les marcheurs traverseront plusieurs Etats : le Madhya Pradesh, le Rajasthan (un Etat très touristique mais encore très arriéré : climat semi-désertique peu propice à l'agriculture, taux d'alphabétisation bas, statut de la femme peu enviable, tradition des mariages d'enfants qui se perpétue, système agricole encore partiellement féodal...), l'Uttar Pradesh, l'Haryana, et enfin le territoire de Delhi.

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20 septembre 2007 4 20 /09 /septembre /2007 18:13

Plus de 200 Occidentaux vont participer à la marche d’octobre 2007, aux côtés des Indiens sans terre. Pourquoi se lancent-ils dans cette aventure ? Un petit sondage de leurs motivations s’imposait. Voilà certains de leurs témoignages :


Jean-Louis Bato
: “Je suis le délégué international de l’association Solidarité et c’est à ce titre que je participe au Janadesh. J’ai eu la chance de travailler en Inde pendant 15 ans, dont 5 (1973-1977) avec le mouvement Boodhan (=”don de la terre”) et son leader Vinoba Bhave, le disciple de Gandhi. […] J’espère que le gouvernement indien sera à l’écoute des 300 millions de sans terre et de tribaux qui ont besoin d’un petit lopin de terre pour assurer leurs besoins essentiels et leur dignité. J’espère qu’il   mettra en oeuvre une véritable révolution agraire et distribuera les terres en friche (30% du territoire) dont il reste encore propriétaire. Lors des précédentes marches, certains gouvernements d’états ont déjà commencé comme par exemple dans l’état du Chattisgarh en 2003 où le gouvernement a distribué 6000 acres ».


Gerald Conyngham
(Angleterre) : « Je suis quaker et suis engagé depuis longtemps dans des approches non violentes de la paix et de la justice. J’ai travaillé il y a  deux ans comme « peace accompanier » [je ne me risque pas à traduire  l’expression !] dans la bande de Gaza, où j’ai côtoyé pendant trois mois des Israéliens et des Palestiniens qui cherchaient une solution juste au conflit. Les Quakers soutiennent Ekta Parishad [l’organisation à l’origine de la marche] et un groupe qui s’appelle le “South Asia Peace Network”. Personnellement, j’ai beaucoup voyagé mais ne suis jamais allée en Inde. Je m’intéresse beaucoup aux « padyatras » [ces grandes marches non-violentes] de la tradition gandhienne et aux fondements spirtiuels d’Ekta Parishad”.  


Benjamin Peyrot des Gachons
: “Une des forces du mouvement Ekta Parishad est de prolonger l’action politique de Gandhi qui consiste à utiliser la mobilisation non-violente comme puissant moyen de pression et de négociation auprès des autorités. C’est un levier universel et démocratique que l’on doit s’employer à mettre en œuvre dans notre contexte national”.


Louis Campana
, qui va réaliser le film “la marche déesepérée des paysans sans terre” avec François Verlet : Bien au fait des problèmes des sans terre indiens, il explique qu’”une des premières lois votées par le Congrès après l’indépendance stipule que la terre appartient à l’Etat, sauf si l’on peut justifier d’actes de propriété. Les petits paysans, les tribaux dans leurs forêts, les corvéables à merci des villages indiens, analphabètes pour la plupart, ont fait les frais de ces décisions”. Il souligne qu’”il y a trente ans, les tribaux n’existaient même pas à l’état civil”. “Des lois ont été votées qui donnent droit aux paysans de réclamer des terres si elles sont libres et appartiennent à l’Etat. Maintenant, c’est au gouvernement central qu’il faut réclamer le droit pour les paysans de l’ensemble de l’Inde d’avoir accès aux terres disponibles”.

Louis Campana et François Verlet adoptent une approche universaliste : "si ces marcheurs réussissent à mobiliser les forces politiques indiennes autour de leurs droits, il sera possible aux autres miséreux de la planète d’en faire autant dans leurs propres pays”.

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20 septembre 2007 4 20 /09 /septembre /2007 18:04

Vu ce soir sur le site Internet du quotidien The Hindu, un grand journal national en anglais : un lien vers le site « Brahmins in India : search and marry from your own cast. Register free ! Search, chat and marry ».

Près de 60 ans après l’adoption de la constitution de l'Inde indépendante (1950), qui abolit le système des castes, dominé par les brahmanes (traditionnellement, les prêtres et enseignants), il y a de quoi se taper la tête contre les murs…
Les journaux indiens regorgent d'annonces matrimoniales classées par castes. Seules les personnes issues des communautés tribales ou intouchables, c'est à dire tout en bas de l'échelle sociale hindoue, précisent en général "caste indifférente".
Les annonces des musulmans, des sikhs, des chrétiens et des jaïns sont généralement classées à part. Au-delà de la caste et de la religion de nombreux autres critères entrent en ligne de compte : carnation (une peau foncée va presque toujours de paire avec l'appartenance à une basse caste), végétarisme plus ou moins stricte, langue maternelle, niveau d'étude, valeurs de la famille (plus ou moins traditionnelles...),revenu annuel... A lire certaines annonces, on se prend à se demander si la perle rare qui rassemblera toutes ces qualités existe belle et bien...


Photo : pendant la marche Janadesh, une femme porte un portrait d'Ambedkar, le père de la constitution indienne qui abolit le système des castes. Lui-même était intouchable (dalit, comme on dit aujourd'hui).

 

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19 septembre 2007 3 19 /09 /septembre /2007 18:02

Dans moins de deux semaines, 25 000 personnes commenceront leur marche à Gwalior. Gwalior où il faisait 37° aujourd’hui. Une température pas tout à fait idéale pour marcher, surtout quand on sait qu’il fait encore entre 28 et 32° la nuit.

 En Inde, la météo est loin d’avoir un impact anecdotique sur la vie quotidienne et l’économie. A titre d’exemple, la mousson de 2004 a été très mauvaise. Conséquence : la croissance de l’économie en 2004-2005 n’a été “que” de 6,9%, contre 8,5% l’année précédente. Eh oui, l’agriculture indienne contribue à plus de 20% du PIB et l’irrigation n’est pas assez développée pour lever les dépendances à l’égard des eaux du ciel.

Dans ce pays où les deux tiers de la population active sont employés parl’agriculture, le réchauffement climatique pourrait avoir des conséquences énormes. Une hausse des températures moyennes de 2° pourrait ainsi faire baisser de 20% la production de riz (plante la plus cultivée en Inde).

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15 septembre 2007 6 15 /09 /septembre /2007 17:56

Tata. En français, ces deux syllabes ont une consonance enfantine, mais en Inde c’est un nom qu’on ne prononce pas sans respect et admiration. Des camions gigantesques qui rugissent sur toutes les routes du pays aux sachets de thé et aux chaînes d’hôtels, le conglomérat Tata est omniprésent en Inde.

 Près de 140 ans après sa création, le géant de l’économie indienne emploie plus de 220 000 personnes dans le monde et réalise 2,8 % du produit intérieur brut indien. Géant à l’intérieur du géant, « Tata Tea » n’est que l’une des 96 compagnies qui le constituent. En 2000, le groupe a racheté de Tetley Tea, une entreprise qui symbolisait à elle seule l’ancien

Empire britannique. Ce rachat a fait de Tata le deuxième vendeur de thé au monde.

A Munnar, au Kerala (extrême Sud-Ouest du pays), les collines couvertes de plantations de thé se déploient à perte de vue (un endroit d’une beauté à couper le souffle, croyez-moi !). Tata Tea est quasiment le seul employeur de la région. Fidèle à sa tradition paternaliste, l’entreprise héberge ses employés saisonniers dans des dortoirs, finance des écoles et des hôpitaux (cf article de L’Expansion, 2003). Bref, elle cultive une image d’entreprise soucieuse de l’humain, du bien-être de ses ouvriers (il ne faut cependant pas être trop angeliste : le Plantation Labour Act voté en 1951 autorise par exemple les enfants à partir de 12 ans à travailler dans les plantations).

Pourtant, depuis plusieurs années, des affrontements sans fin opposent des hommes politiques locaux à l’entreprise, qui se défend d’occuper illégalement des terres qui ne lui appartiennent pas.

 Schématiquement, d’un côté l’entreprise emploie plus de 20 000 personnes et fait vivre la région, mais de l’autre la monoculture et le monopole de Tata rendent la population très dépendante de l’entreprise (les cueilleurs sont liés de génération en génération à la plantation) et « acculturent » notamment les populations tribales qui vivaient dans ses collines, de plus en plus assaillies par la déforestation. Entre la logique de développement d’une entreprise symbole de la réussite économique de l’Inde et les droits des habitants de la région, l’arbitrage n’est pas simple.

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Présentation

  • : Le blog de pondibéa
  • : reportage sur la marche des paysans sans terre indiens, de Gwalior à New Delhi, en octobre 2007
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Texte Libre

Ce blog se propose de suivre d'un bout à l'autre la grande marche gandhienne "Janadesh 2007" des paysans sans terre indiens, oubliés de la croissance de l'"Inde qui brille". Il en expliquera autant que possible les tenants et les aboutissants et profitera de cet immense mouvement populaire -25 000 personnes, hommes, femmes, enfants, vieillards, en marche vers New Delhi- pour éclairer certains aspects de l'Inde contemporaine. Une Inde dont la population reste rurale à plus de 70%.
La blogeuse : Béatrice Roman-Amat, jeune journaliste passionnée par l'Inde.
Ce blog était à l'origine un blog de la rédaction du Monde interactif, mais quand lemonde.fr l'a archivé, je l'ai recréé sommairement sur over-blog.